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Grippe aviaire: les élevages vidés à partir de lundi dans 18 départements

L'interdiction s'appliquera dans toute l'Aquitaine, la quasi-totalité de Midi-Pyrénées, la Corrèze, la Haute-Vienne, ainsi que certaines communes de l'Aude, du Cantal et de Charente.

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16 janvier 2016 à 7h53

​​L'interdiction temporaire d'installer de nouveaux animaux entrera en vigueur par étapes à partir de lundi dans les élevages d'oies et de canards de 18 départements du sud-ouest, afin d'éradiquer l'épizootie de grippe aviaire, selon un arrêté paru samedi au Journal officiel. L'interdiction s'appliquera dans toute l'Aquitaine (Dordogne, Gironde, Landes, Lot-et-Garonne, Pyrénées-Atlantiques), la quasi-totalité de Midi-Pyrénées (Ariège, Aveyron, Haute-Garonne, Gers, Hautes-Pyrénées, Tarn, Tarn-et-Garonne et une partie du Lot), la Corrèze, la Haute-Vienne, ainsi que certaines communes de l'Aude, du Cantal et de Charente. Dans cette zone, la mise en place de canetons de moins d'une semaine sera interdite dans les élevages dès lundi. A partir du 8 février, les canetons de moins de quatre semaines seront également bannis, puis l'ensemble des palmipèdes à compter du 1er avril. Cette dernière date est cependant susceptible d'être modifiée, a indiqué à l'AFP le ministère de l'Agriculture. L'interdiction doit en effet permettre de réaliser un "vide sanitaire" dans les élevages, dont les détails n'ont pas encore été définis, en particulier la durée. Pour les autres espèces de volailles (poules, dindes, pintades), les préfets pourront interdire la mise en place de nouveaux animaux dans les élevages ne pouvant prouver que les procédures sanitaires prévues (nettoyage, désinfection, vide sanitaire) ont été respectées. Les éleveurs de palmipèdes à foie gras ont estimé que ces mesures leur coûteront entre 250 et 300 millions d'euros et que "des indemnisations de l'Etat seront indispensables". La branche avicole de la FNSEA a également demandé des "aides financières pour les éleveurs" de volailles. La grippe aviaire, qui n'avait plus été repérée en France depuis 2007, est réapparue en Dordogne fin novembre. A ce jour, 69 foyers d'influenza aviaire hautement pathogène ont été découverts dans huit départements du sud-ouest. Ce virus n'est pas transmissible à l'homme, selon les premières analyses révélées mi-décembre par l'Agence de sécurité sanitaire de l'alimentation (Anses). Le gouvernement a en outre régulièrement rappelé que la consommation de volaille, oeufs et foie gras ne présente aucun risque.

Le choc sera immédiat. Dès lundi, démarrage du processus de "vide sanitaire", les canetons cesseront d'être livrés dans les exploitations, dans les couvoirs, des oeufs seront cassés. Puis l'onde de choc "ira crescendo", chez les producteurs d'aliments, les transporteurs, les conserveries... La filière foie gras représente quelque 100.000 emplois en France, selon l'interprofession. "Ca nous pendait au nez, même si quelque part on espérait encore. Là, ça y est, on est dans le dur. C'est un gros, gros coup", résume François Destribos, éleveur-gaveur de canards à Sainte-Colombe dans les Landes, premier département producteur parmi les neuf concernés --à ce jour-- par le vide sanitaire. Cette zone fournit 28 des 36 millions de canards produits en France chaque année. Comme l'interprofession, comme son syndicat (FDSEA), l'éleveur se convainc que "la moins mauvaise solution" a été retenue, car l'Europe "poussait derrière, voulait l'abattage systématique, ce qui aurait été un coup énorme, impensable". Mais qui s'est vu dans d'autres pays. Reste que le "dépeuplement progressif par non-réintroduction d'animaux", nom officiel de la stratégie, masque une réalité brutale: la fermeture d'exploitations plusieurs mois durant, le temps que le virus disparaisse. Une fois les canards actuels arrivés en fin de cycle, "d'avril à septembre, on ne pourra plus gaver, de mars à juillet on ne pourra plus élever", prédit Destribos. Avec trois mois pour mener le canard au gavage, la filière a déjà les yeux rivés vers la date de reprise des activités: de premiers abattages sont espérés vers septembre-octobre, afin d'avoir une production prête pour les fêtes de fin d'année, quand s'écoule plus de 70% de la production. "Pouvoir remettre des canetons en élevage en août, c'est l'extrême limite jouable pour assurer une fin d'année 2016. En attendant, on vit comment ?", demande Annie Lataillade, éleveuse à Bidache (Pyrénées-Atlantiques), avec des crédits en cours, notamment pour l'investissement dans des cages nouvelles de mise aux normes européennes au 31 décembre dernier.

 

 "Il y aura accompagnement de l'Etat", a promis vendredi le ministre de l'Agriculture Stéphane le Foll. "Quand ?" demandent les éleveurs, qui attendent aussi un geste fort de l'Europe.  "Puisqu'on est sur un incident sanitaire majeur, puisque l'Europe, les pays-membres, ont des exigences fortes, naturellement la solidarité européenne doit opérer, c'est une évidence", prévient Christophe Barailh, président du Cifog (Comité interprofessionnel des palmipèdes à foie gras), qui évalue l'impact du plan d'éradication à 250 et 300 millions d'euros. "Je n'ose imaginer que l'Europe n'intervienne pas comme elle est intervenue dans d'autres pays, Bulgarie, Hongrie, où il y a eu des foyers" d'influenza.

 

 

Bernard Duval est producteur dans le sud-ouest, il élève 70 000 canards à l’année. Nous l'avons rencontré à Lescar dans les Pyrénées-Atlantiques. Ecoutez-le au micro de Régis Bachelu

BV, RB avec AFP