Près de Castres. La "Crem'arbre", une nouvelle ZAD, sort du bois
Les opposants à l'autoroute A69 Castres Toulouse ont lancé ce week-end un appel à occuper un bois sur le lieu-dit la Crémade à Saïx, près de Castres (Tarn), non loin de la ZAD évacuée le 22 octobre dernier. Au pied des arbres, un nouveau camp est en formation.
Publié : 8 janvier 2024 à 19h46 par Axel Mahrouga
Trois jours après l'appel lancé sur les boucles de messagerie et les réseaux sociaux, le tableau des tâches à réaliser sur le camp reste encore bien fourni. Le 5 janvier 2024, les opposants à la construction de l'autoroute A69 Castres - Toulouse ont exhorter aux « personnes déterminées pour occuper et stopper la construction de l'autoroute A69 », à converger vers le site de la "Crem'Arbre", sur le lieu-dit la Crémade à Saïx (Tarn). À quelques centaines de mètres à vol d'oiseau, les gendarmes avaient procédé à l'évacuation d'une ZAD en formation dans une ancienne ferme le 22 octobre dernier, en marge de la deuxième grande mobilisation contre la 2x2 voies.
Pour les collectifs, à l'initiative de l'appel, « ces bois, symboles de lutte, mais aussi source de biodiversité, se doivent d'être défendus par tous les moyens, contre les tractopelles qui continuent d'avancer et alors que des recours juridiques sont encore en cours ». Plusieurs grimpeurs avaient déjà investi les arbres du site, en novembre dernier, suite à l'abattage de feuillus aux alentours de Cuq-Toulza.
En ce début de semaine, plusieurs voitures et camionnettes stationnaient sur le parking improvisé dans un champ boueux, jouxtant le bois. Le long du « chemin des écureuils », l'allée centrale du camp, grimpeurs et petites mains se croisent. À droite, de grandes tentes sont déjà dressées et les sanitaires montés. Sur la gauche, en levant les yeux, les arbres sont occupés. « Les chantiers courants sont d'aménager des espaces d'accueil, des communs et de continuer les constructions dans les arbres », commente Adrien*, l'un des opposant présent sur le site.
« La prise de décision est collective »
Pour l'instant, la seule source d'électricité sur le site réside dans une grosse batterie alimentée par un panneau solaire installé dans les arbres. Autour du lieu de vie principal, l'équipe en charge du feu, s'occupe de raviver les flammes et d'agrémenter les abords pour préparer les froides nuits qui s'annoncent cette semaine.
Entre les va-et-vient sur la Crem'arbre, difficile d'estimer le nombre exact d'opposants installés actuellement sur le site. Ceux présents ne préfèrent pas avancer de chiffre précis, mais Lucie* est confiante : « D'ici deux jours, on sera une centaine, on le sait ». Pour organiser la vie sur le site, les résidants ont opté pour une organisation « totalement horizontale ». En bref, « la prise de décisions est collective, tout se fait en réunion, il y a eu des recherches de consensus. Tout est communiqué au nom de tout le monde. On n'a pas de chef, il n'y a pas de référent », résume la militante. La "micro-société" revendique « une forme d'autonomie » vis-à-vis des collectifs anti-A 69 déjà existants selon Adrien, mais « un lien fort » existe entre eux selon l'opposant. « On est allié dans la lutte contre l'A69 ».
Les gendarmes veillent
Mais en milieu d'après-midi, plusieurs sifflets viennent rompre le vacarme des coups de marteaux. L'injonction est donnée : « Grimpez ! Grimpez ! ». Le long de la départementale, deux voitures de la gendarmerie s'approchent du site. Les militaires mettent pied à terre, un dialogue s'installe. Une visite « quotidienne », selon les opposants rencontrés sur le site qui n'avait pour but aujourd'hui que de demander aux occupants de circuler à visage découvert dans le village de Saïx.
Sur le site, la crainte d'une opération de gendarmerie existe. « Tous les matins, on est prêt à ce qu'il y ait une expulsion », confesse Lucie. Installés sur un terrain privé, les moyens légaux des militaires pour investir le site sont pour l'instant limités. En ligne de mire, déjà, tenir jusqu'au 15 février prochain est l'objectif des opposants présents sur le lieu-dit de Saïx. C'est à cette date que la coupe des arbres sera de nouveau autorisée, et ils comptent bien empêcher les abatteuses de franchir le petit fossé qui sépare le camp de la départementale.
Dans la semaine, les occupants doivent continuer à organiser leurs « moyens de défense ». Leur doctrine ? Tenter de faire grossir les rangs des "habitants" du site en ralliant les habitants à leur cause. « L'expulsion n'aura pas lieu si les gens du coin sont d'accord que cette autoroute ne devrait pas avoir lieu », résume Adrien. Les militants misent également sur la possibilité de grimper dans les arbres en cas d'intervention, pour ralentir l'action des gendarmes. Des barricades pourraient également être dressées à l'instar de la première ZAD du mois d'octobre dernier. Mais à ce jour, aucune ne bloque l'accès au site.
Jeudi prochain, les collectifs opposés à l'autoroute A69 appellent à une grande mobilisation sur ce bois, à proximité de Levézou avant d'accélérer le chantier dans le week-end.
*Les prénoms ont été modifiés