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Castres. Une quarantaine de clients identifiés sur un mois, le studio servait aux passes

Trois prévenus, deux hommes et une femme, étaient jugés ce jeudi 14 septembre 2023 par le Tribunal de Castres pour des faits de proxénétisme. Un studio loué par une castraise a servi de lieu de passes pendant plusieurs années, sans que la loueuse ne soit au courant selon ses déclarations à la barre.

Prostitution
Le studio était loué entre 150 à 600 euros la semaine
Crédit : Adobe Stock

15 septembre 2023 à 16h34 par Axel Mahrouga

«Vous êtes payés au black par des filles qui ne sont pas là pour faire du tourisme !». La conclusion de la présidente du tribunal de Castres est cinglante. À la barre, devant les magistrats, une Castraise de 45 ans tente de les convaincre de son ignorance. «J'ai loué au black, mais je ne savais pas au départ que c'était pour ça !». 

Devant la juridiction, elle comparaissait ce jeudi 14 septembre 2023, pour avoir loué un petit studio, attenant à sa propriété, ayant servi à des prostitués pour accueillir leurs clients. La finalité d'une enquête de deux ans, démarré par une lettre anonyme envoyée aux services sociaux sur de possibles faits de prostitution au sein du domicile de la prévenue. Les informations, provenant d'une "amie" de la prévenue, ont donné lieu le 18 mars 2021 à un signalement au parquet. L'enquête démarre. 

Très vite, le domicile est mis sur surveillance. Les voisins et parents d'enfant allant à l'école de danse juste à côté de l'habitation sont entendus. Certains commencent à se plaindre d'allées et venues d'hommes, restant peu de temps. Sur le parking, à proximité du logement, les voitures défilent. À l'intérieur du studio, les filles s'enchaînent. Plusieurs clients sont contrôlés et confirment avoir eu recours à des services de prostitution. Un policier en civil ira même jusqu'à frapper à la fenêtre du studio et une femme, en très petite tenue, lui aurait répondu. 

Rentrée d'espèce régulières sur les comptes en banque

Ces prostituées attiraient leurs clients via des annonces postées en ligne sur un site spécialisé. Les profils changeaient régulièrement, mais un numéro revenait souvent : celui de la propriétaire. Selon la prévenue, le profil qui a été créé en son nom est une tentative de chantage de la part de son "amie" qui l'avait dénoncé aux services sociaux. À la barre, elle affirme constituer en ce moment même un dossier pour saisir la justice de cette affaire.

Les enquêteurs commencent cependant à s'intéresser un peu plus sur sa personnalité. Avec cette amie, elle se livrait elle-même à la prostitution il y a quelques années. Un temps désormais révolu selon la prévenue. Ses comptes en banque attirent également l'attention. Sur l'un entre eux, des rentrées d'espèces régulières sont suspectes. +100, +60, +300 euros à quelques jours d'intervalle. Ces sommes proviendraient selon elle de fonds récoltés pour une association. 

Pour le parquet, ces mouvements d'argent proviendraient plutôt des fruits de la location de son studio. Une petite habitation qu'elle avait d'abord proposée sur des plateformes en ligne. Mais la pression des taxes mis en place par ces entreprises l'a incité à gérer directement les réservations avec ses clients. Un studio qu'elle louait pour « 150 à 300 euros » par semaine selon elle, jusqu'à 600 euros selon certains éléments de l'enquête. 


« Elles vous faisaient des réductions ? Même pas ! »

A ses côtés deux hommes de 67 et 77 ans comparaissaient également devant le tribunal. Le premier pour avoir transporté contre 50 euros une des prostituées de la gare de Toulouse jusqu'au studio. Le sexagénaire était un ami et voisin de la propriétaire du logement. De temps en temps, il venait y faire de petits travaux et aurait découvert le poteau rose, alertant la prévenue des activités se déroulant dans le studio. 

Le septuagénaire, lui, s'occupait des allers-retours entre l'aéroport de Toulouse et l'appartement. Des trajets qu'il effectuait gratuitement. « Je suis en manque d'affection, je suis seul », explique-t-il à la barre, avouant avoir parfois recours aux services de celles qu'il transportait. Des trajets qui lui permettaient d'obtenir des rabais ? « Même pas ! », confie-t-il. « La vie est dure monsieur », rétorque la présidente du tribunal. 

A l'issue de l'audience, la prévenue a été condamnée à 24 mois de prison, dont 12 avec sursis et l'interdiction de louer le local pendant 3 ans. Le septuagénaire lui, est condamné à 12 mois de prison, dont 8 avec sursis, et le sexagénaire 5 mois de prison avec sursis. 

Les trois prévenus devront également régler solidairement la somme de 1200 euros à l'association « Équipe d'Action Contre le Proxénétisme», partie civile dans cette affaire au regard de son intérêt public.Les clients du studio comparaîtront, eux, devant le tribunal de police à la fin du mois.