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Enquête 100% - Cazères : l’ancien maire accusé d’avoir facilité l’implantation d’un commerce dont il est co-gérant

100%

2 septembre 2021 à 9h45 par Brice Vidal

Des petits arrangements ont-ils permis l’ouverture de ce restaurant dans une zone à fort potentiel ?

 

L’ambiance se tend à Cazères alors que les élections municipales se tiennent les 12 septembre. Et le 19 en cas de second tour. Le maire PS Michel Oliva, largement réélu en 2020, a annoncé en juin qu’il mettait fin à son mandat. Trois listes vont s’affronter : celle de son successeur désigné Ahmed Hamadi, celle de l’opposant historique et radical valoisien Jean-Luc Rivière, enfin une autre liste à gauche portée par Maryse-Hélène Malroux et soutenue par GRS – la gauche républicaine socialiste.

 

Un restaurant sans concurrence près du nouveau lycée

 

Mais dans la petite commune du nord Comminges, un dossier risque d’empoisonner la campagne : l’installation du restaurant « Beau et Bon » rue des maraîchers à l’été. Car le maire et ses proches sont gérants ou associés rémunérés de cette structure. Selon Jean-Luc Rivière, « la mairie en 2019 a fait modifier le PLU (Plan local d’urbanisme) pour interdire tous les commerces sur 40 hectares à proximité d’un futur nouveau quartier près du lycée », « sur quelle solution de restauration 600 élèves dès la rentrée, 1200 l’an prochain, ainsi que 1500 nouveaux habitants vont tomber directement ? » questionne le conseil municipal d’opposition.

Par ailleurs, « devant la commission départementale d’aménagement commercial, la liste des commerces complémentaires à installer entre Sport 2000 et Carrefour ne faisait pas mention de Beau et Bon. »

Jean-Luc Rivière annonce avoir saisi le tribunal administratif d’autant que « un permis de construire modificatif a été attribué pour la terrasse de cet établissement ». PLU, Commission d’aménagement commercial, permis de construire : trois instances pilotées par la mairie ou associées…

 

Une affaire de famille ?

 

Beau et Bon / SARL Burger Cazérien est géré par le couple formé par les enfants de l’ancien maire Michel Oliva et de sa compagne, elle-même directrice générale des services de la mairie de Cazères. De quoi subodorer un drôle de conflit d’intérêt pense celui qui fut ancien directeur de cabinet à la ville de Nancy, « j’ai découvert ça lors du vote des subventions à la communauté de communes, et quand j’ai interrogé Christian Sans, vice-président au développement économique : tout le monde était très mal à l’aise. » L’ensemble des adjoints de Cazères présents, dont Ahmed Hamadi engagé dans la course à la mairie, ont validé sans sourciller les subventions attribuées à cet établissement appartenant en partie au maire « alors qu’ils auraient dû sortir de la salle lors du vote. »
 

Les collectivités justifient les subventions


Les subventions ne sont pas anecdotiques : elles représenteraient au titre de la communauté de communes 8145 euros. Le département a accordé 7826 euros « dans le cadre de la délégation de la compétence d’octroi des aides en matière d’immobilier d’entreprises. Ce dossier sera présenté à la prochaine Commission permanente du 23 septembre 2021 » précise le conseil départemental. La Région a accordé 61 000 euros. Soit un total de 77 000 euros d’argent public. La région Occitanie précise « la création de ce restaurant d’une capacité de 80 couverts rentre dans la stratégie régionale de redynamisation […] des bourg-centres […] le projet d’un coût total de 407 000 € bénéficie d’une aide de la Région à hauteur de 15%, ce qui est le taux appliqué aux autres projets de ce type et adoptés lors des dernières commissions permanentes. »

 

Contacté Ahmed Hamadi se défend « on est dans Gala avec cette affaire, c’est ridicule, il y en a assez de ces attaques personnelles, surtout de la part de Mr Rivière qui n’a jamais rien fait pour la ville. Tous les élus de la communauté de communes ont voté pour la subvention, sauf Mr Rivière. »

Ahmed Hamadi, dont les quelques 8000 bulletins de vote affichant une photo et le soutien de Carole Delga en vue des municipales, ont été retoqués en commission ce mercredi par la préfecture de Haute-Garonne ; « la note de la préfecture n’était pas à jour » contestait-il dans un premier temps, « le document que nous avions attestait qu’aucune disposition n’interdisait de faire figurer une photo des candidats au côté d’autres personnalités non-candidates aux élections. » (Ahmed Hamadi nous rappelait plus d'une heure plus tard après cette première précision et dénonçait cette fois nos informations affirmant que « tout était prêt mais aucun bulletin n’a été tiré. »)

Nous n’avons pas pu joindre à date Michel Oliva, dont le numéro de portable ne répond plus. Il a quitté ses fonctions fin juin. Ce proche de Carole Delga est déjà sous le coup d’une mise en examen pour "corruption passive" et "blanchiment". Michel Oliva est soupçonné d’avoir volontairement avantagé un promoteur immobilier pour bénéficier d’un rabais sur l’achat de sept appartements, en 2011. Des biens acquis avec sa compagne, DGS de Cazères…

 

Photo : FB  @beauetbon.cazeres